Double inspiration aujourd’hui pour la petite nouvelle qui suit. D’abord une suggestion donnée dans un forum dédié aux nouvelles : un étrange sourire. Et pour l’esprit, celui d’Edgar Allen Poe avec l’épigraphe de Double Assassinat dans la Rue Morgue d’Edgar Allen Poe (dans la traduction de Baudelaire).
Quelle chanson chantaient les sirènes ? Quel nom Achille avait-il pris quand il se cachait parmi les femmes ? — Questions embarrassantes, il est vrai, mais qui ne sont pas au-delà de toute conjecture.
Sir Thomas Browne
Ces questions embarrassantes reviennent à se demander quelle était la ruse utilisée pour commettre l’acte qui allait permettre de tromper l’ennemi (Ulysse pour les sirènes, Troie pour Achille). Le narrateur établit ainsi un contrat de lecture avec le narrataire, lui révélant qu’il devra résoudre une énigme qui sera de déceler la ruse du brigand.
Imaginons maintenant que le brigand soit l’écrivain lui-même ou plutôt le narrateur. Que veut-il gagner ? Que veut-il obtenir de son lecteur ou narrataire?
Il veut obtenir que celui-ci soit attentif à tout ce qu’il dit et poursuive sa lecture jusqu’au bout, croyant tout ce qu’il dit. Et qu’il soit peut-être surpris à la fin.
Pour le rendre attentif, il va le flatter, le rendre complice, faire qu’il se sente intelligent, peut-être même plus que lui, l’auteur. Il va lui offrir des sensations, des sentiments d’attente, de suspense, des évènements qui le feront frémir. Il l’emmènera dans un monde passionnant, prenant, qui le comblera autant du point de vue de l’intellect que des sens. Il lui permettra de rêver et d’imaginer. De réfléchir et s’aventurer dans des hypothèses. Il y aura au moins un point culminant qui coupera le souffle du lecteur. La résolution du problème ne se déroulera pas sans anicroches. Enfin, la fin comblera les attentes du lecteur ou encore, le laissera se tourmenter quelques temps à se demander si la résolution était bien telle qu’il l’avait comprise et si ce n’était pas plus compliqué que cela.
Je n’ai pas encore tant d’ambition mais voici ma nouvelle de ce jour.
Un sourire à frémir
